LE POINÇONNEUR DE L'IA
À vous de chanter ou déchanter ce prodigieux karaoké ! En réinterprétant la chanson Le poinçonneur des Lilas de Serge Gainsbourg, l’artiste dénonce l’invisibilisation des micro-tâches réalisées par des humains, payés au mieux au lance-pierre pour leurs heures de travail, et pourtant nécessaires au bon fonctionnement des algorithmes d’IA. L’innovation toujours poussée au maximum cache en effet le travail de ces petites mains, ces petits clics, dans notre économie numérique.
Artiste qui examine avec humour (parfois noir) nos temps hypermodernes, Filipe Vilas-Boas développe une critique satirique de la notion de progrès technologique tout en cultivant sa propre poésie analogique et numérique. Ses installations, vidéos et performances mêlent IA et DIY, robotique et philosophie, sociologie et littérature, astronomie et musique.
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Transcription de la pastille sonore :
En miroir du travail documentaire de Nicolas Gourault sur les travailleurs du clic, venez chanter dans ce drôle de karaoké. Ou plutôt, déchanter : Filipe Vilas-Boas, artiste conceptuel connu pour ses détournements autour des nouveaux médias, a choisi l’ironie pour parler du sujet. Il parodie la célèbre chanson de Serge Gainsbourg “Le poinçonneur des Lilas” [extrait chanson]. Il dénonce avec humour les coulisses d’une réalité économique, sociale et humaine : le capitalisme cognitif.
Avec l’essor des réseaux sociaux et de l’IA, nous sommes en effet entrés dans un nouveau système capitaliste non plus basé, comme jusqu'alors, sur le travail physique, mais sur nos pratiques numériques collectives. En plus des clics assumés des travailleurs payés à la tâche ou au clic pour labelliser les images de bases de données nourrissant les programmes d'IA, il existe également des clics dissimulés, un travail gratuit que nous fournissons à notre insu.
Vous avez sans doute déjà été confronté sur internet, aux captchas, ces tests requis pour accéder à certaines fonctionnalités en ligne, vous demandant de retranscrire un texte flou, ou de cliquer sur les cases comportant un panneau de signalisation, une voiture… ? Et bien ces données que vous produisez alors, sont ensuite fournies aux programmes informatiques d’IA afin de les améliorer dans ce type de tâche, et ainsi les rendre plus robustes ! Autrement dit, sans travail humain, que ce soit le vôtre ou celui des travailleurs et travailleuses du clic des pays du sud, pas d’efficacité ni d’automatisation de l’IA possible.
Ce qui nous fait revenir aux petits trous de la chanson de Serge Gainsbourg : les cartes perforées sont les ancêtres des programmes informatiques. Le premier exemple d'usage, c’est le métier à tisser Jacquard en 1801, première machine mécanique programmable aux applications industrielles. Face à cette nouvelle automatisation des tâches, les tisseurs de soie lyonnais s’étaient alors révoltés, par peur d’être remplacés… Avec le travail du clic, on repart en quelque sorte en sens inverse avec des humains exploités par la technologie pour assurer les micro-tâches. La boucle est cliquée !
https://lumieressurlequai.fr/
Crédit visuel : Filipe Vilas-Boas
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