Le calvaire sans nom et sans fin des mères divorcées - Par Aziz BOUCETTA
Quand on parle de l’égalité entre les sexes au Maroc, l’une des premières idées qui vient à l’esprit est l’héritage, le point culminant de cette égalité. C’est noble, c’est valorisant et c’est sans doute vrai dans l’absolu, mais avant, les femmes divorcées vivent bien des problèmes dans leur vécu. Considérons par exemple les problèmes que causent des divorces dans les vies des mères et de leurs enfants. Un traumatisme collectif silencieux et des dégâts immenses à appréhender à l’avenir.
La Moudawana de 2004 a changé une quantité importante de choses dit-on, mais en réalité, elle aura juste servi à sortir les femmes de l’âge reculé où elles se trouvaient. Aujourd’hui au Maroc, la société a évolué et les femmes se sont autonomisées, du moins sur le plan personnel, mais les résistances sont là, importantes et impérieuses. Le Maroc compte près de 8,8 millions de ménages, et environ 1,4 million sont dirigés par une femme seule, mère célibataire ou divorcée. Ce sont donc des millions d’enfants qui vivent sans père, et ces millions d’enfants sont soumis à une législation qui les dépasse, souvent les fragilise, et parfois les détruit, mentalement, éducationnellement et financièrement.
On parle beaucoup de Moudawana, on se gargarise des efforts consentis par le Maroc, on se rengorge des avancées en matière de droits des femmes, quota et tutti quanti… On est bien trop souvent autosatisfaits, mais on oublie encore plus souvent ces souffrances muettes, ces déchirures qu’endurent les femmes, et principalement les mères divorcées qui voient leurs calvaires extraordinairement amplifiés par ceux de leurs enfants.
Une mère divorcée perd la garde de son enfant si elle se remarie ; la loi et la société lui donnent donc le choix effrayant entre sa vie de femme, sa féminité, et son rôle de mère. Elle est privée de passion, de sentiments, de sexualité, de vie. Une mère divorcée reste sous l’emprise, souvent vindicative et parfois brutale de son ancien mari pour changer d’adresse d’habitation, pour faire inscrire son enfant à une autre école, pour décider d’une opération chirurgicale pour cet enfant, pour voyager avec lui à l’étranger… elle ne peut souvent même pas ouvrir de compte d’épargne à ses enfants et les gérer, puisque c’est le père qui est le tuteur ! Au Maroc, lorsqu’une femme renonce à son statut de femme mariée, c’est pour plonger dans celui de mère célibataire, divorcée, qui doit continuellement expliquer à son enfant sans père que son père ne fait rien pour lui. Et l’Etat temporise, pendant que la société la stigmatise.
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