Arabie Saoudite-Chine-Iran: quelle équation? - Par Mustapha SEHIMI
Il faut rappeler qu’il y a plus d’une vingtaine d’années, un accord sécuritaire avait été conclu entre l’Arabie saoudite et l’Iran, le 17 avril 2001, mais il n’a jamais été mis en œuvre. Il avait été conclu sous les auspices d’un responsable de la Chine, Wang Yi, promu ensuite ministre des Affaires étrangères (mars 2014-décembre 2022).
Le 10 mai prochain, il est prévu le rétablissement des relations diplomatiques saoudo-iraniennes. Une grosse surprise sans doute. De fait, les discussions entre les deux pays ont débuté en avril 2021, et ce par l’intermédiaire de Bagdad et avec l’aide d’Oman.
La dynamique en cours s’est accélérée avec la rencontre des ministres des Affaires étrangères saoudien et iranien à Pékin, voici deux semaines, le 6 avril courant. Un rendez-vous qui devait discuter, entre autres, du retour des ambassadeurs et consuls. La surprise? Elle tient, en revanche, à la médiation de Pékin… Traditionnellement, la Chine ne priorisait pas un rôle sur les questions politiques et de sécurité dans la région.
Désormais, un contexte pousse dans ce sens: blocage sur l’accord nucléaire avec Téhéran, impacts de la guerre en Ukraine sur l’envol des prix des produits alimentaires et énergétiques dans la région. Et Pékin a estimé qu’elle pouvait agir pour calmer le jeu.
Après tout, pourquoi pas? Elle a d’excellentes relations avec l’Arabie saoudite et les autres membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG); il en est de même avec l’Irak, l’Iran, Israël et l’Égypte. De quoi lui offrir l’opportunité de s’ériger en acteur global responsable.
En parrainant un accord destiné à apaiser les tensions et en particulier à prévenir un conflit ouvert entre Israël et l’Iran. Il faut ajouter que Pékin profite de fait de la perte d’influence politique américaine auprès des dirigeants du Golfe; qu’elle s’est assurée que les parties respectent les principes de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures; et qu’elle offre une plateforme de parrainage de cet accord de normalisation entre les deux pays à saisir par Riyad -en creux, n’est-ce pas au passage l’échec de tout ce qui a été tenté avec Washington pour stabiliser la région?
Hormis Israël, l’ensemble des pays de la région ont accueilli avec soulagement cette normalisation. L’investissement de la Chine pour aider à bâtir des mesures de confiance entre les deux États suscite le plus d’espoirs parmi les monarchies du Golfe, surtout qu’ils sont les partenaires pivots de ce pays dans la région. Cela dit, Riyad attend et souhaite quoi de Téhéran? Qu’elle agisse pour faciliter les réconciliations internes au Yémen; qu’elle pèse de tout son poids pour convaincre les houthistes de conclure une paix durable à la frontière du royaume; que cette normalisation puisse contribuer à faire pression sur les milices chiites en Irak et celles du Hezbollah au Liban.
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