La nouvelle doctrine étrangère de la Russie - Par Mustapha SEHIMI
Voici quelques semaines, a été publié officiellement un document sur la nouvelle doctrine étrangère de la Fédération de Russie. Un texte de 42 pages présenté par Vladimir Poutine, lors d’une réunion du Conseil de sécurité nationale. Il remplace celui édicté en 2016. Ce document entérine la rupture profonde entre la Russie et les pays occidentaux. Son référentiel est celui d’un affrontement digne de l’époque de la Guerre froide.
Dans ce document de référence synthétisant la nouvelle doctrine étrangère de la Russie, les Occidentaux sont accusés de vouloir «affaiblir la Russie par tous les moyens et «d’imposer» des principes idéologiques pseudo-humanistes et néolibéraux qui conduisent à la perte de la spiritualité traditionnelle et des principes moraux». Ce serait une «guerre hybride» venue de l’Ouest.
Un texte de première importance: il définit durablement la place et le leadership mondial que revendique ce pays-continent de plus de 17 millions de km2 et de pas moins de neuf fuseaux horaires. A-t-il été bien appréhendé dans toutes ses dimensions par les uns et les autres? Si tel avait été le cas, le président Macron ne se serait sans doute pas échiné à téléphoner au président Poutine, plus d’une vingtaine de fois -un total d’une trentaine d’heures… Ce que l’on pourrait appeler la «diplomatie du téléphone» ne porte pas ses fruits: tant s’en faut. Et le locataire de l’Elysée a sans doute péché par présomption comme s’il pouvait arriver à influencer son pair du Kremlin...
Cela dit, comment ce dernier voit la Russie? Comme pays-civilisation «unique» avec une mission pratiquement millénariste: celle d’une puissance eurasiatique et même euro-pacifique, au cœur du développement pacifique de l’humanité et du maintien de l’équilibre mondial. C’est ce prisme-là qu’il faut retenir: il éclaire la conception et le prisme des stratèges russes dans leur interprétation du monde en mutation. La Russie se veut une puissance historique qui ne saurait être reléguée à un rang secondaire par des puissances hostiles occidentales, une hostilité qui s’est cristallisée avec le conflit ukrainien. Depuis le 22 février 2022, le curseur de Moscou à l’endroit des autres Etats est ternaire: une approche constructive, neutre ou inamicale et hostile. Il se prononce pour une plus grande démocratisation des relations internationales. Mais en même temps, le document dénonce certains «Etats habitués à penser conformément à la logique de la prédominance globale et néocolonialisme… qui refusent de reconnaître les réalités d’un monde multipolaire».
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